Patrimoine de marque : 240 caractères qui coûtent cher

Le contexte

En avril 2021, la marque Evian publie sur son compte Twitter un message encourageant à boire au moins un litre d’eau par jour, comme elle en a l’habitude. Hasard de calendrier : nous sommes le premier jour de Ramadan, et il n’en faut pas moins pour que se manifestent des réactions outrées pointant une “maladresse” à l’encontre des musulmans qui entrent dans le jeûne en France et dans le monde. 

Prise de panique, la marque présente ses excuses. Mais comme rien n’est jamais simple sur les réseaux sociaux, ces excuses provoquent l’ire de tweetos bien plus nombreux (50 000 tweets auront nommé la marque en 24h, soit dix fois plus qu’en temps ordinaire). Le sujet génère des dizaines d’articles sur la toile et la marque se retrouve alors au centre d’un bad buzz identitaire et politique qui fera date. 

Les conséquences

  1. Écornement d’image : pendant quelques semaines, Evian n’est plus la marque universelle qui rend jeune mais le véhicule d’une querelle entre extrêmes
  2. Dénaturation du message : alors que la communauté musulmane n’était pas visée initialement, certains consommateurs peuvent retenir de l’épisode qu’Evian est une marque islamophobe.
  3. Exposition aux “chantages” : Evian est perçue par les minorités revendicatives, religieuses ou non, comme une marque de qui l’on peut obtenir facilement
  4. Frilosité : échaudée par l’expérience, la ligne éditoriale de la marque sur les réseaux sociaux s’inhibe pour perdre en personnalité

S’excuser, se taire ou dépasser les clivages ?

Les grandes entreprises sont souvent bien équipées pour la gestion de leur réseaux sociaux mais mal préparées sur le fond du discours qu’elles veulent y défendre. Particulièrement face aux mobilisations et chantages de l’activisme politique, caractéristiques de notre époque. 

Evian est Evian. Son patrimoine de marque est fort, son imaginaire autour de la jeunesse a marqué une génération. Boire de l’eau est une nécessité physiologique et une question de santé publique, que l’on soit musulman, chrétien, athée… et les pratiquants du Ramadan s’hydratent bel et bien à la fin de la journée ! Evian devrait avoir toute l’assurance nécessaire pour ne pas culpabiliser sous quelques tweets égarés, et se réapproprier ces quelques vérités fortes.

Comment faire ?

Tout d’abord, admettre la nature polémique des échanges sur les réseaux sociaux. Et pourquoi pas en jouer ? 

D’abord en rappelant que cette publication était animée d’une préoccupation de santé publique et qu’une hydratation appropriée en période de grosse chaleur est un précept élémentaire.  

Mieux : si la marque avait défini le modèle de valeurs dans lequel s’inscrit son action, elle aurait su répondre que l’eau est la condition même de l’existence. Et que le sens du jeûne, pour les musulmans et les personnes animées par une vie spirituelle, est de se priver d’un élément essentiel à la vie pour éprouver leur condition de créature et mieux retrouver la saveur de la vie… et de l’eau. 

Cela implique :

  1. D’avoir préparé une philosophie de marque en regard des questions spirituelles et communautaires qui traversent la société, qui soit capable de les transcender, 
  2. De former les responsables de la communication digitale et les community managers à ces fondamentaux de marque, aux phénomènes d’activisme de minorité, et aux réflexes ou au recul à adopter vis-à-vis de ces situations.

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Et comme si ça ne suffisait pas...

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