La Vie : manger vegan ne rend pas meilleur, seulement vegan. 

Une récente campagne publicitaire de l’entreprise “La Vie”, qui produit et commercialise des “lardons végétaux” et du “bacon végétal”, menée d’une main de maître par l’agence Buzzman, très inspirée et percutante, a relancé le débat sur l’appellation des produits végétariens portant le même nom que leurs modèles carnés. Les ressorts de cette campagne : de l’humour et le recours à des préjugés questionnables. 

“Les lobbys c’est pas la vie” sauf quand ils servent la même cause que vous.

La Vie, en affichant son mépris pour le lobby du porc qu’elle assure ridiculiser, se donne le bon rôle. Cette campagne a d’ailleurs été couronnée de succès puisque le décret interdisant aux produits végétariens de porter le même nom que les produits à base de viande qu’ils imitent a été suspendu par le Conseil d’État.

Au-delà d’une guerre des lobbys fortement mise en scène, cette dernière décision du Conseil d’État ainsi que la campagne qui a permis ce revirement mettent à jour une nouvelle donne. Faisant appel à l’affect des consommateurs et du législateur, usant d’une communication pop, créative et insolente, La Vie verse dans une moralisation du débat et une diabolisation “aimable” de ses opposants. Le lobby du porc endosse le mauvais rôle d’institution réactionnaire et cruelle, quand La Vie, elle, est force de proposition et entreprise à mission. 

La paille (de plastique) et la poutre : 

En d’autres termes, le parti pris de La Vie, ce qu’elle défend, c’est qu’une transition environnementale et une réduction des souffrances animales sont possibles : mais elles passent nécessairement par le changement des habitudes des consommateurs – la consommation étant l’acte de confort par excellence, par la réponse immédiate  qu’il donne à un désir.  Partant de là, consommer des produits vegan est une alternative idéale.

Mais cet appel du pied au consom’acteur est questionnable. C’est d’ailleurs la thèse de l’anthropologue Fanny Parise qui, dans son ouvrage Les Enfants gâtés, écorche avec brio le modèle défendu par des marques comme la Vie que l’on peut qualifier “d’influenceur domestique”. Pour l’auteur, qui propose de déconstruire la croyance en un idéal de consommation sans effet sur notre environnement, promu justement par ces influenceurs, ceux-là “vont participer à diffuser de nouvelles normes de groupe liées à la consommation. Cela va leur permettre de se distinguer socialement mais aussi de se dédouaner : si on arrête de manger de la viande, on va continuer à prendre l’avion ou à acheter sa garde-robe sur Shein.”

Les clients de la Vie ne s’habillent probablement pas chez Shein. Cependant, la plus grosse collaboration commerciale en date de La Vie avec le géant de la restauration rapide Burger King pose quelques problèmes… En effet, La Vie, en conscience, est une entreprise à mission, qui s’engage “à [vous] concocter de la viande végétale meilleure pour votre santé, celle de la planète et des animaux, sans aucun compromis sur le goût. Pour ceux qui, comme nous, aiment le goût de la viande mais préfèrent celui de la vie.” Faire rimer santé de la planète et Burger King, multinationale accusée à de nombreuses reprises de “greenwashing” à cause de l’impossible tri des déchets dans ses restaurants ou de l’empreinte carbone colossale qu’elle laisse derrière elle, voilà qui laisse songeur. Le modèle économique proposé par le créateur du “Whopper” n’est peut-être pas celui qui convient le mieux pour “soigner la planète”. Le Monde, dans un article de 2017 titrait même Burger King, “roi de la déforestation” faisant référence aux ravages causés par la culture du soja servant à nourrir les bovins approvisionnant en viande la chaîne outre atlantique. 

Avec un tel partenaire, moquer le lobby du porc qui entend simplement protéger la dénomination de ses produits pour éviter tout malentendu pour le consommateur peut paraître malvenu. En l’espèce, que l’industrie française du porc défende son bout de gras est peut-être plus honorable que la volonté de La Vie de convertir la malbouffe au véganisme… 

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